Informations sur l'ascension
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Avant de partir en montagne !
- Météo
- Matériel
- Conditions d'enneigement
Je ne peux que trop vous conseiller de bien lire ces articles ainsi que mes tutoriels montagne.
Mon ascension
Début juin 2025. Même si le printemps a bien entamé son œuvre, la montagne reste encore bien enneigée en altitude. Les itinéraires engagés se font rares, et trouver un sommet d’envergure sans se confronter à trop de neige relève presque du défi. D’ailleurs, les skieurs de rando sont toujours à l'œuvre sur les pentes nord, preuve qu’on n’est pas encore en été, malgré le calendrier.
En fouillant un peu les cartes et les sommets autour d’Ancelle, je repère une enfilade prometteuse : Cuchon – Petite Autane – Tête du Seigneur – Grand Autane. Une ligne presque parfaite, exposée plein sud, qui devrait permettre d’éviter le gros de la neige. Depuis la vallée, le Cuchon et la Petite Autane sont bien visibles – secs. Le Grand Autane, en revanche, se fait plus discret. Invisible d’ici… mais intriguant.
Cette fois, je ne suis pas en mode "bivouac sauvage". Je suis installé au camping des Auches à Ancelle. Un petit coin paisible, parfait pour faire une pause confortable après plusieurs jours de temps instable et de risque d'orage. Ces derniers temps, avec le changement climatique, la montagne devient vite imprévisible : coulées de boue, chutes de pierres, orages violents… alors parfois, mieux vaut une nuit tranquille sous un toit, ou sous la toile, mais en sécurité.
Sur place, je discute avec les propriétaires, adorables et passionnés. Monsieur est lui-même un randonneur aguerri, et il me confirme que l’itinéraire, bien que soutenu, devrait être praticable grâce à son exposition sud. Je prends quand même piolet et crampons – la montagne, ça ne pardonne pas.
Au petit matin, sous une pluie fine, j’attaque l’ascension du Cuchon. Rien de très technique, mais la météo est encore capricieuse. Heureusement, les prévisions annoncent une amélioration dans la journée. Une fois ce premier sommet derrière moi, les choses sérieuses commencent : la montée vers la Petite Autane est raide, escarpée, parfois aérienne. Le vide s’invite, et il ne nous quittera plus.
Depuis la crête, j’aperçois enfin le Grand Autane. Majestueux. Lointain. Haut. Et encore bien enneigé sur son versant nord. Pour le rejoindre, il faut progresser longuement sur une arête parfois effilée, entre pierriers, rochers et névés. À certains endroits, le "chemin" n’en est plus un – il faut suivre les cairns, improviser, escalader, poser les mains. Je suis sûrement un des premiers à passer cette saison, les traces sont absentes, et j’ai la montagne pour moi seul.
À mesure que je grimpe, le paysage se déploie. Au sommet du Grand Autane, le silence, l’immensité. La vue se fend sur le Dévoluy, les Écrins, le Champsaur... J’ai l’impression d’être sur une course alpine à 3500 mètres, et pourtant, on est à peine à 2700. Le jeu en valait largement la chandelle. Une randonnée grandiose, spectaculaire, exigeante – exactement comme je les aime.
Pour la descente, je poursuis sur la crête des Autanes. Moins engagée que la montée, mais toujours aussi aérienne. Au col de Rouanette, un grand névé m’attend. Quel plaisir de faire la première trace, de sentir cette neige encore froide sous les pieds. Puis vient l’alpage, la verdure, le retour progressif à la vallée.
Cerise sur le gâteau : je n’ai croisé personne, pas une âme. Seul dans cette ligne de crête, suspendu au-dessus des vallées. Une de ces journées qui marquent, où tout s’aligne. Une randonnée engagée, sauvage, esthétique… à faire une fois dans sa vie.
Anecdote
Sous la Petite Autane, un rocher étonnant émerge du sol : "la Moure du Piürc" – littéralement "le groin du porc" en patois local. Une appellation aussi imagée que précise, transmise par les anciens du Champsaur. On se plaît à croire qu’ici, même les pierres racontent des histoires.